Hello,
Ici Kelly pour le premier numéro du So Manny Adventures, le média qui nous permet de raconter nos aventures les plus folles et nos réflexions profondes pendant notre tour d’Afrique.
En direct du Maroc, je vous raconte cette fois les dessous de la vidéo #8 On dort chez des cultivateurs de kif.
Si vous ne l’avez pas encore vue, c’est par ici :
On va pouvoir parler clairement ici, puisque YouTube ne risque pas de nous censurer 😜
Pour le tournage de cette vidéo, nous avons eu la chance d’être hébergés chez deux familles qui dépendent de la production de cannabis pour leurs revenus.
Les histoires que je vais raconter ici se passent chez la deuxième famille.
Au début de la vidéo, on annonce être tombé chez une super famille accueillante. C’est vrai. Je dis aussi qu’à aucun moment on ne s’est sentis en danger. Ca, c’était avant que la nuit ne tombe 😅
Je vous raconte :
On décide donc de monter dans le rif, une région berbère montagneuse que nous avons envie d’explorer un peu plus. Je vous remets la carte pour vous situer :
A ce moment là, on avait déjà fait la connaissance par hasard du premier cultivateur dans la région de Chefchaouen et on décide de se rendre à Azila pour faire quelques plans supplémentaires des cultures pour la vidéo.
En regardant cette carte, on remarque que les deux localités sont situées dans les principales zones de culture de cannabis du Maroc :
On continue à rouler et on croise des cafés sur le bord de la route. Les gens essaient de nous arrêter tous les mètres pour nous vendre du hashish. En toute tranquillité, comme à Chefchaouen 🤷♀️ On passe notre chemin et on continue à avancer pour prendre de l’altitude.
Sur le coup de 13h, on arrive à Azila. On commence à fatiguer et on décide de chercher un endroit au calme pour bivouaquer et tourner. On s’arrête sur un petit parking pour regarder la meilleure route à prendre. Nous sommes vite repérés par un homme, Younès*, qui parle français et qui nous dit être le président de la commune. Il nous explique qu’Azila est un tout petit village et qu’il n’y a ni café, ni restaurant dans les environs. Sans tarder, il nous invite à manger avec sa famille.
Rassurés par nos expériences passées, on accepte avec joie. On est affamés par la route et une pause nous fera du bien.
On se retrouve dans une maison modeste où la tôle fait office de toit et où l’odeur des moutons se mêle à celle des poules et du repas fraichement préparé.
De lui-même, Younès nous montre fièrement les plantations de cannabis qui entourent la maison et nous dit que toutes les parcelles sont à lui et sa famille.
Vers 15h, Younès nous dit qu’il a du travail au village et nous laisse avec ses enfants (15, 13 et 5 ans). Il nous explique qu’ils vont nous faire visiter les alentours et qu’il sera de retour pour le repas du soir.
Les enfants sont adorables. On visite les champs de kif (cannabis, vous l’avez compris) comme s’il s’agissait de tournesols 😅 On en profite pour tourner plusieurs séquences qu’on voit dans la vidéo. On fait du pain, on mange des fruits, on boit du thé. Nadia*, la nièce de Younès me propose de me faire un dessin au henné sur la main… On prend des photos pour immortaliser ces moments. Bref, on passe vraiment une bonne journée avec les enfants et le reste de la famille de Younès. Personne ne parle français mais on se débrouille avec les gestes et quelques mots de base.
La soirée arrive. C’est là que les choses sérieuses commencent.
La jeune Amina* (15 ans) me propose d’aller à la soirée entre filles qui a lieu pour fêter le mariage d’un couple d’habitants du village qui se tiendra le lendemain.
J’ai envie d’accepter mais avec Greg, on s’est promis de ne jamais se séparer pendant notre voyage, question de sécurité. Surtout que la carte internet est dans le modem de le voiture. Du coup, si on s’en éloigne, on n’a pas de réseau et donc pas de moyen de communiquer.
Cependant, on se dit que ce sera une occasion qui ne se représentera pas de si tôt, que tout le monde est super gentil… Je décide d’y aller.
Deux soirées totalement différentes se profilent alors pour Greg et moi.
Ma soirée :
Je m’apprête à sortir avec toutes les filles du village. Les jeunes, les mamans et les grands-mères, toutes sont de la partie.
On se rend chez la future mariée, sous une tente décorée dans un style typiquement berbère.
Les tapis épais recouvrent le sol rocailleux du jardin, les drapés rouges occultent la tente tandis que des tissus (toujours rouges) recouvrent les chaises et les tables dispersées ça et là.
La musique, diffusée par une enceinte géante, est si forte qu’on doit l’entendre à l’autre bout de la montagne. L’ambiance est à la fête.
Les filles dansent le chaabi, une danse typiquement marocaine qu’elles maitrisent à la perfection. Je suis littéralement en admiration. Certaines enlèvent leur voile pour le nouer autour de leur taille. D’autres tentent laborieusement de m’apprendre les bases de la danse 😂 Voilà à quoi ça ressemble (quand elles dansent, pas moi 😅) :
Je ne prends aucune image de cette soirée, par respect. D’ailleurs, personne n’utilise son téléphone pour photographier ou filmer. Je comprends que cette fête se passe dans l’intimité et qu’elle doit rester privée. Je me sens privilégiée de vivre ça.
Je remarque que Nadia*, la jeune femme au henné, est en rivalité avec une autre fille, vêtue d’une magnifique robe traditionnelle bleue. Je le comprends parce que ça, c’est universel 😅 quand on se jette des regards noirs et qu’on se surpasse pour montrer qu’on danse mieux que l’autre, c’est qu’il y a anguille sous roche. Et ça ne loupe pas. Une bousculade de trop et c’est le drame.
Une bagarre entre les deux jeunes filles éclate. Mais pas une petite gifle ou un petit tirage de cheveux. Plutôt une vraie bagarre d’une violence incroyable. Je n’avais jamais vu ça. J’entends le bruit sourd des coups et des touffes de cheveux qui s’arrachent. Les femmes doivent s’y mettre à plusieurs pour les séparer tellement la rage les prend au ventre.
Quand la bagarre prend fin, la jeune fille en bleu se fait chasser par les femmes plus âgées. Elle part en pleurant et je ne la reverrai plus de toute la nuit. Là, je prends la mesure du pouvoir de la famille de Younès* dans le village.
La soirée reprend son cours comme si de rien n’était. Le couscous arrive pour qu’on reprenne des forces pour danser jusqu’au bout de la nuit. Je m’éclate avec les filles qui m’ont prises sous leur aile.
La soirée de Greg :
C’est une toute autre ambiance.
Younès* revient vers 23h. Il explique à Greg qu’il ne vit pas à Azila toute l’année. Greg comprend au fil de la discussion que Younès* ne fait pas que cultiver le cannabis. Qu’il a une maison dans une grande ville et des contacts pour le trafic à Bruxelles, Amsterdam et même à Liège (notre ville d’origine en Belgique 😳).
D’un coup, il demande à Greg d’un ton ferme de venir avec lui chercher une machine à laver. On est d’accord qu’un trafiquant de drogue qui va chercher une machine à laver à 23h, c’est chelou ? Même s’il se dit que ça a l’air bizarre, Greg accepte pour ne pas contrarier Younès*.
Après quelques centaines de mètres, Younès* s’arrête pour prendre un autre homme dans la voiture. Le passager monte et Greg découvre qu’il est défiguré. Il a le visage défoncé. Sa pommette est entaillée, tout comme son front. Son œil droit est tellement gonflé et injecté de sang qu’il ne doit plus voir grand chose de ce côté là. Je ne parle même pas de ses mains (dont les jointures sont couvertes d’ecchymoses violacées) en bouillie.
Younès, qui a dû deviner le malaise dans le regard de Greg, lui explique tranquillement que le mec a fait un combat la veille et qu’il a encore des séquelles. Greg commence à comprendre. Mais il ne veut pas tirer de conclusions hâtives.
Younès* reprend la route et d’un coup, il dit à Greg :
- “Vous avez pris des photos des femmes aujourd’hui. C’est pas bien du tout ça”. Greg, à qui personne n’avait dit d’éviter les photos, est surpris. La tension commence à monter.
Younès* continue “Un jour, des journalistes français sont venus faire un reportage sur mon kif. Mais ils ont pris des images des femmes aussi. Ca a causé des gros problèmes dans le village. Je ne veux plus que ça arrive”. Il fait nuit noire et Younès empreinte des petites pistes de montagne, où ils ne croisent personne. Greg, abasourdi par le ton soudain menaçant et les yeux noirs de Younès, commence à élaborer un plan “extrême urgence” dans sa tête. Il met sa main sur le loquet de la portière pour être prêt à sortir à tout moment. Quitte à sauter de la voiture en marche.
Un loooong moment plus tard, Greg aperçoit l’ombre d’une maison perdue au milieu des plants de cannabis avec plusieurs camionnettes garées dans l’allée. Il se demande où il est tombé et ce qui va lui arriver. Surtout après les menaces de Younès et l’arrivée de l’homme balafré. Il reste sur le qui vive et se tient prêt à courir comme il n’a jamais couru.
Younès* lui dit d’attendre devant la maison et de ne pas entrer. Greg n’a de toute façon aucune envie de passer la porte. Quelques minutes après, Younès revient avec la fameuse machine à laver qu’ils chargent dans la voiture😅
Avant de repartir, Younès répond enfin à son téléphone qui n’arrête pas de sonner depuis plusieurs minutes.
C’est alors qu’il dit à Greg “il y a encore un combat ce soir. Ca se passe mal. J’ai des choses à régler. On y va”.
Dans un élan de lucidité, Greg lui demande de le reconduire d’abord à la maison. Il explique qu’il aimerait me retrouver, savoir comment je vais etc. En fait, il veut éviter à tout prix de se rendre sur le lieu des combats illégaux à la fight club. C’est mon film préféré mais mieux vaut que tout ça reste derrière l’écran !
Contre toute attente, Younès* accepte de ne pas l’emmener au combat et le ramène au village, à la condition qu’il lui donne les liens de tous nos réseaux sociaux. Il veut vérifier qu’on ne mette aucune image de femmes en ligne. Il lui demande Youtube, Insta et Facebook. Il ne doit pas connaitre LinkedIn (tant mieux pour moi 😅). Il lui demande aussi son numéro whatsapp en lui envoyant un message pour vérifier, au cas où. C’est précisément ça qui m’a donné envie de lancer mon carnet d’aventure avec inscription.
Quand on se retrouve en fin de nuit, Greg me dit qu’il ne faut pas trainer ici. On prend nos affaires sous le bras et on court vers Manny sans bruit pour sortir du village au plus vite comme des voleurs.
Conclusion :
Ici se termine le premier numéro de So Manny Adventures. Je suis super heureuse d’avoir pu raconter ces anecdotes qui étaient quasiment condamnées à rester secrètes puisqu’impossibles à raconter sur les réseaux, vous l’aurez compris.
Si vous avez aimé cette histoire et que vous en voulez d’autres, likez cette édition du So Manny Adventures en cliquant sur le mini cœur ❤️ en-dessous du titre de l’email. Ca me fera super plaisir et ça nous motivera pour la suite de notre périple. Vous pouvez aussi poser vos questions et écrire un petit commentaire sympa en cliquant sur la bulle 💬 à côté du ❤️.
En tout cas, merci d’avoir lu jusqu’au bout😁
PS : venez sur LinkedIn et Insta, on s’amuse bien aussi 😏
Allez, à la prochaine 🖐️
Kelly & Greg (So Manny Roads).
* Tous les noms ont été modifiés 😉
Mais c’est fou. J’en reviens pas de toute l’histoire 😅 vous avez du flipper quand même omg (et surtout Greg) 😅😅
😱 C'est digne de la série Narcos !
Je n'aurai pas voulu être à la place de Greg... Vous avez bien fait de quitter les lieux.
Bien que si ça avait été une série Netflix, j'aurai bien voulu connaître la suite du périple.😄
Merci de nous partager toute votre aventure.
Prenez soin de vous, ne faites pas d'imprudences ! ❤️